Le rôle clinique des pharmaciens en établissement : l’exemple de la clinique préopératoire au CHU

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À l’occasion de la Journée mondiale des pharmaciens qui a lieu le 25 septembre, nous souhaitons mettre en lumière un volet souvent méconnu de cette profession : le rôle du pharmacien en milieu hospitalier universitaire1.

Contrairement au pharmacien communautaire, dont les fonctions sont bien connues du grand public, le pharmacien en établissement joue un rôle clinique essentiel au sein des équipes de soins. 

Son travail s’articule autour de cinq grands axes :

  • Services pharmaceutiques

  • Soins pharmaceutiques

  • Enseignement

  • Recherche 

  • Usage optimal des médicaments


Pour illustrer concrètement cette contribution, nous avons rencontré une pharmacienne et un pharmacien du CHU de Québec-Université Laval (CHU) qui œuvrent à la clinique préopératoire, un milieu où leur expertise est pleinement mobilisée pour assurer la sécurité et l’efficacité des traitements avant une chirurgie. 

  • Erwan Nidelet, pharmacien à l’Hôpital Saint-François d’Assise depuis 6 ans 

  • Andréanne Plante, pharmacienne à l’Hôpital de l’Enfant-Jésus depuis 13 ans

À travers leur témoignage, découvrez comment les pharmaciens en milieu hospitalier interviennent en amont des soins pour optimiser les traitements, prévenir les interactions médicamenteuses et accompagner les patients dans leur parcours chirurgical. 
 


Une expertise essentielle en clinique préopératoire

Pourquoi l’implication du pharmacien est-elle si importante en clinique préopératoire?

Erwan Nidelet : « Le regard du pharmacien est primordial pour sécuriser les soins avant une chirurgie. On optimise les thérapies pour diminuer les risques associés à la poursuite ou à l’arrêt des médicaments, et on traite les débalancements électrolytiques. On conseille également sur la consommation de tabac, d’alcool ou de drogue, et on ajuste les médicaments usuels avant et après l’intervention. Cette expertise, à la fois unique et complémentaire, permet aux autres professionnels de se concentrer sur leur propre champs d’expertise. »

Andréanne Plante : « Notre présence améliore non seulement la sécurité et l’efficacité des cliniques préopératoires, mais aussi la trajectoire globale du patient. L’un des enjeux majeurs est la compréhension des consignes préopératoires. Le pharmacien joue un rôle clé pour les clarifier, tant auprès des patients que dans la coordination avec les pharmacies communautaires. »
 


Une pratique dynamique et variée

Comment décririez-vous votre travail ou une journée typique dans ce secteur?

Erwan Nidelet : « Chaque jour, je rencontre des patients qui subiront une chirurgie élective et qui répondent à des critères de référence en pharmacie – antécédents médicaux, médication particulière ou habitudes de vie spécifiques. Je les accompagne pour expliquer et clarifier les consignes liées à l’arrêt ou à la reprise des médicaments, tant en pré qu’en postopératoire. »

Andréanne Plante : « Il n’y a pas de journée typique. Les thérapies sont de plus en plus complexes, et je collabore avec plusieurs spécialistes, ce qui est extrêmement valorisant. En plus, en soutenant la ligne Info-Chirurgie pour les patients du CHU qui sont retournés à la maison, je sens que je contribue à l’ensemble de leur parcours chirurgical. »

Erwan Nidelet : « Notre milieu de pratique est très dynamique et innovant. À ma connaissance, ce modèle de pratique n’est pas encore répandu partout au Québec. Récemment, nous avons accueilli des techniciens en pharmacie à la clinique préopératoire, ce qui nous permet de partager notre expertise et de renforcer le travail d’équipe. »
 


Un milieu stimulant pour les jeunes pharmaciens

Que diriez-vous à un(e) jeune pharmacien(ne) qui souhaiterait exercer en établissement?

Erwan Nidelet : « C’est le milieu parfait pour tirer profit de toutes les connaissances acquises pendant nos nombreuses années d’études. Il permet réellement de devenir l’expert du médicament! »

Andréanne Plante : « Exercer en établissement, c’est collaborer étroitement avec les autres professionnels et avoir accès à l’ensemble des données cliniques nécessaires pour formuler les meilleures recommandations. C’est aussi une opportunité de faire évoluer sa carrière dans un domaine spécifique, que ce soit en enseignement, en recherche ou en gestion. »
 


Une profession valorisante

Qu’est-ce qui est valorisant et stimulant dans votre travail?

Erwan Nidelet : « Ce qui me motive, c’est le travail d’équipe et le contact humain. Tous les intervenants visent le même objectif : soigner ou soulager les patients. Notre rôle permet d’allier rigueur scientifique et relation humaine, en accompagnant le patient pour qu’il puisse prendre des décisions éclairées. »

Andréanne Plante : « Ce qui me motive, c’est mon autonomie professionnelle. Résoudre des cas complexes et sentir qu’on fait une réelle différence, c’est très valorisant. »
 


L’enseignement, un pilier de la pratique

Quelle est la place de l’enseignement dans votre secteur? 

Erwan Nidelet : « À la clinique préopératoire, mon rôle d’enseignement s’exerce principalement auprès du personnel infirmier, des consultants et des médecins, notamment sur la gestion des médicaments. J’élargis aussi ce rôle auprès des patients, afin de m’assurer qu’ils comprennent bien les consignes liées à leur médication. L’enseignement est très présent dans le secteur chirurgical. Par exemple, en chirurgie vasculaire – un domaine spécialisé à l’Hôpital Saint-François d’Assise – j’ai un rôle d’enseignement que je considère comme primordial. C’est probablement la seule occasion, dans le parcours universitaire d’un étudiant en pharmacie, de rencontrer des patients ayant subi ce type d’intervention dans la phase aigüe post-opératoire. »

Andréanne Plante : « L’un des sujets incontournables avec les étudiants est la gestion des opioïdes. Je leur explique que c’est l’une des rares occasions où ils peuvent apprendre à ajuster cette médication dans un contexte opératoire. Ces notions sont utiles non seulement en établissement, mais aussi pour ceux qui choisiront la pratique communautaire. Je sais que mes conseils leurs seront utiles, comme par exemple recommander à un patient de débuter avec la moitié d’un comprimé et de faire ensuite un suivi de la tolérance et de l’efficacité. Ce sont de simples interventions qui permettent d’éviter des réadmissions à l’urgence pour des effets indésirables. »
 


Des leviers pour structurer la pratique

Quels éléments structurants soutiennent votre pratique au quotidien? 

Erwan Nidelet : « Deux comités ont récemment eu un impact concret sur la pratique en préopératoire. D’abord, le Comité de pharmacologie joue un rôle important dans la structuration des ordonnances, des guides et des protocoles. Les sous-comités dédiés à la sécurité des médicaments, comme celui qui se concentre sur l’insuline et les traitements du diabète, permettent d’encadrer les pratiques et de promouvoir les meilleures pratiques. »

Andréanne Plante : « Au-delà de la pratique clinique, mon implication dans les comités liés à la prise en charge des patients en contexte opératoire est très stimulante. J’ai participé à plusieurs groupes de travail et protocoles touchant le secteur préopératoire. C’est un moment privilégié pour collaborer en interdisciplinarité et faire évoluer les pratiques. »
 


Une intégration prometteuse en milieu clinique

Pouvez-vous nous parler de l’arrivée des technicien(ne)s en pharmacie dans votre secteur clinique? 

Andréanne Plante et Erwan Nidelet : « L’expérience est très positive! L’intégration des technicien(ne)s en pharmacie dans le secteur clinique est récente, et nous sommes heureux de les accueillir dans ce nouveau rôle. Leur contribution aura un impact significatif, tant sur le travail des pharmaciens que sur la qualité des services offerts aux patients. Bien sûr, cela demande une période d’adaptation – parfois déstabilisante au début – mais cette nouveauté nous pousse à revoir nos façons de faire, à nous réévaluer et à évoluer ensemble! »
 


Une intervention qui change tout

Pouvez-vous nous donner un exemple concret où la présence du pharmacien en clinique préopératoire a fait une réelle différence pour le patient ? 

Andréanne Plante : « Une patiente présentait une déficience fonctionnelle importante au niveau des plaquettes, non détectable par les analyses de laboratoire. J’étais la dernière intervenante à la voir avant sa chirurgie – une prothèse de genoux bilatérales. J’ai recommandé un médicament essentiel pour prévenir les saignements, et j’ai coordonné la prise en charge avec l’anesthésiste, le chirurgien et l’hématologue. Cette intervention a non seulement renforcé la sécurité de la patiente, mais elle a aussi permis d’éviter l’annulation de la chirurgie et une utilisation inefficace des ressources. Des exemples comme celui-là, il y en a plusieurs! »
 


Une profession en constante évolution

Ces témoignages illustrent sans contredit l’impact concret du pharmacien en clinique préopératoire, tant sur la trajectoire du patient que sur la qualité des soins. 

Mais au-delà du secteur chirurgical, la contribution des pharmaciens en établissement universitaire s’étend à une multitude de secteurs cliniques et de services en lien avec le médicament. 

L’élargissement progressif de leur autonomie professionnelle, notamment en matière de prescription, favorise une meilleure fluidité des soins et une efficience accrue – avec des bénéfices directs pour les patients. C’est une profession portée par des personnes engagées, soucieuses du bien-être des patients et de l’amélioration continue des soins de santé.
 

Bonne Journée mondiale des pharmaciens à tous ceux du CHU qui contribuent à notre culture d’excellence et d’innovation!


 


Note
1.    Les pharmaciens intéressés à travailler en milieu hospitalier doivent d’abord obtenir leur doctorat de premier cycle en pharmacie (« Pharm D »), puis poursuivre à la maîtrise en pharmacothérapie avancée qui est constituée de stages dans le milieu hospitalier et d’un projet de recherche clinique. 


 


Commentaires



 

Voir les commentaires (2)
24 septembre 2025

Bonjour,

Les étudiants de 4e et 5e secondaire qui souhaitent réaliser une journée d'observation dans notre établissement doivent adresser une demande par l'entremise de l'organisme Jeunes explorateurs (https://www.jeunes-explorateurs.org/). Pour de plus amples informations, nous vous suggérons de vous renseigner auprès du service d'orientation de l'établissement d'enseignement de votre fils.

En ce qui concerne l'infolettre du CHU de Québec-Université Laval, vous pouvez vous y inscrire avec le lien qui se trouve complètement au bas de cette page : https://www.chudequebec.ca/accueil.aspx. N'oubliez pas de cliquer sur le lien de confirmation qui vous sera envoyé par courriel pour que votre abonnement soit effectif.

Merci de votre intérêt et bonne journée!

Par Isabelle Roy pour Le Chuchoteur
23 septembre 2025

Intéressée de recevoir votre insolente. Et aussi mon fils qui est au secondaire est intéressé par le métier de pharmacien et souhaite vivre une expérience dans ce contexte : stage, bénévolat ou autre. Merci de m'aider à lui trouver des pistes dans ce sens.

Par Meryam Oubou


Dernière révision du contenu : le 22 septembre 2025

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