De l’écoute à l’accueil






Par Mario Drouin, intervenant en soins spirituels – 1er avril 2016
CIUSSS de Lanaudière
 
La formation d’intervenant en soins spirituels passe par une solide formation à l’écoute. Savoir écouter pourrait sembler facile, car nous le faisons depuis notre tendre enfance. Mais au fait, qu’est-ce qu’écouter? C’est entendre des mots auxquels je donne une signification. C’est tenter de comprendre ce que l’autre est en train de me dire. C’est me laisser toucher par les paroles aimantes, souffrantes ou blessantes de l’autre. L’écoute a donc un effet sur moi. Cette écoute invite à une relation entre deux personnes qui s’interpellent. Je me laisse ainsi transformer par la parole de l’autre. Lorsque j’écoute, j’entre en contact avec moi-même et il n’y a pas seulement ce qui fait écho en moi qui me parle, mais aussi ce qui dérange. Ce qui fait écho en moi est déjà là; ce qui me dérange m’invite à un questionnement, à un accueil de l’autre vers une transformation dans ma vie d’intervenant en soins spirituels.
 
Une demande de prière fait écho en moi. Je l’entends très bien et je comprends combien cela peut faire du bien. Je résonne aux mêmes fibres et c’est agréable. Je me sens compétent et efficace. Une demande de mort me dérange. Présentement, cela ne fait pas écho en moi. Cette demande me frappe de tout son poids. Comment transformer mon écoute en l’accueil de cette demande si dérangeante? Au fil des années, j’ai développé cette aptitude de me laisser déranger sans être ébranlé. Et j’en ai vu les fruits. L’ouverture m’invite à grandir et la fermeture me referme sur moi-même. Aujourd’hui, cela m’aide à entendre ce soin de fin de vie qui est maintenant accessible.
 
Quelle que soit la demande, le processus d’écoute doit demeurer le même. Entendre la souffrance derrière cette question. Qu’est-ce qui pousse une bonne grand-mère à demander l’aide médicale à mourir? Une grand-mère qui a été le pilier de sa famille. Elle qui prenait toutes ses décisions avec son époux qui souffre présentement de démence. Présentement, cette grand-mère est en fin de vie avec une insuffisance cardiaque. Elle sait qu’il ne lui reste pas grand temps à vivre. Totalement dépendante des autres, elle prépare sa prochaine vie au ciel. Elle qui a été heureuse avec sa famille, elle est triste de la quitter, mais elle est centrée sur la Vie qu’elle s’apprête à entreprendre. Elle est attendue au Ciel par des membres de sa famille et par le Seigneur qui tarde à venir la chercher. Elle est prête à prendre la « belle place » au Ciel qu’on lui a promise depuis sa jeunesse.
 
Jour après jour, sa demande est constante et sa condition humaine est intolérable pour elle. Les membres de sa famille accueillent et, après discussion, ils respectent sa demande. Comment pourrais-je ne pas en faire autant? Mon écoute devient accueil de cette dame qui me demande d’être présent à sa cérémonie, comme elle le disait. Une fois les avis favorables de deux médecins donnés, la date et l’heure furent décidées. C’est avec une grande sérénité et une grande foi en la vie que cette bonne grand-mère est entrée dans sa nouvelle Vie entourée de ses enfants et certains de ses petits-enfants.
 
Aux funérailles, je partageais avec la famille que l’écoute de leur mère lors des rencontres m’a permis de vivre une plus grande expérience d’accueil de l’autre et donc de devenir un meilleur intervenant en soins spirituels.




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