Un pharmacien à l’hôpital, ça fait quoi?



Chaque année, c’est le 25 septembre que l’on souligne la Journée mondiale des pharmaciens. Si tout le monde connaît assez bien le rôle d’un pharmacien communautaire, qu’en est-il de celui du pharmacien qui exerce en milieu hospitalier universitaire?

Le travail des pharmaciens en milieu hospitalier, et plus particulièrement dans un établissement universitaire comme le CHU de Québec-Université Laval (CHU) touche à cinq grands axes, soit les activités reliées aux services pharmaceutiques, aux soins pharmaceutiques, à l’enseignement, à la recherche ainsi qu’à l’usage optimal des médicaments. Les pharmaciens sont aussi invités à collaborer à plusieurs comités et certains jouent également un rôle de gestionnaire. 

Les pharmaciens intéressés à travailler en milieu hospitalier doivent d’abord obtenir leur doctorat de premier cycle en pharmacie (« Pharm D »), puis poursuivre à la maîtrise en pharmacothérapie avancée. « Selon moi, ça vaut la peine de continuer ses études, car le travail en centre hospitalier permet de se concentrer sur les soins aux patients, de développer une pratique plus spécialisée et de toucher à l’enseignement, des aspects qui m’interpellent particulièrement, explique Erwan Nidelet, un jeune pharmacien ayant développé une expertise en chirurgie et en orthopédie qui exerce à l’Hôpital Saint-François d’Assise depuis 2019. 

Voici, en quelques lignes, la nature de leur travail.
 

Services pharmaceutiques 

Afin d’assurer la sécurité et la qualité des ordonnances, le pharmacien procède à la validation de milliers de prescriptions pour les patients hospitalisés ainsi que pour les patients en visite dans les cliniques externes et à l’urgence. Il s’assure que l’ordonnance correspond au bon médicament, à la bonne dose, à la bonne voie d’administration (injection, comprimé…), au bon moment et au bon patient. Il considère les risques d’interactions médicamenteuses, les effets indésirables possibles et l’efficacité attendue des médicaments lors de sa prise de décision. Il s’assure également que les médicaments, par exemple les traitements intraveineux et de chimiothérapie, sont préparés selon les normes les plus strictes en vigueur. 

Le département de pharmacie, depuis dix ans, a réussi à implanter un système d’information en pharmacie et un circuit du médicament harmonisés dans l’ensemble du CHU. Il a aussi mis en place un système d’automatisation et de robotisation qui fournit les médicaments pour l’ensemble des hôpitaux, et ce, en collaboration avec la plateforme clinico-logistique (PCL) du CHU. Le département de pharmacie, en collaboration avec les autres directions, vise toujours l’amélioration de la sécurité et de l’efficience du circuit du médicament. À cet égard, des projets seront réalisés dans les prochaines années qui permettront la validation, par code-barres au chevet, des médicaments à administrer et l’usage d’un outil de prescription électronique.
 

Soins pharmaceutiques 

Les pharmaciens travaillent auprès des clientèles des cliniques externes et hospitalisées en tant que membre de l’équipe de soins afin d’ajuster les doses des médicaments selon le patient, d’amorcer des nouvelles thérapies pour optimiser le traitement ou encore, de prévenir et de traiter des effets indésirables. Les pharmaciens peuvent être demandés en consultation par le médecin ou intervenir directement auprès de certaines clientèles selon des critères de pertinence préétablis, que ce soit en cardiologie, en oncologie, en néphrologie, aux soins intensifs, à l’urgence, en médecine familiale ou en chirurgie. Les pharmaciens sont également présents dans certaines cliniques ambulatoires, notamment pour les clientèles d’insuffisance cardiaque, de médecine vasculaire, de diabète et d’hypertension. 

M. Nidelet mentionne également que « La collaboration avec l’équipe de soins et la relation avec les patients permet de mettre en valeur notre expertise en tant que pharmacien et est toujours très gratifiante. Je considère aussi qu’en milieu hospitalier, l’accès aux informations médicales (consultations, diagnostics, signes vitaux, etc.) nous permet de jouer pleinement notre rôle de clinicien, de bien prendre en charge le patient et de prendre des décisions éclairées. »

La pratique en milieu hospitalier offre aussi un accès privilégié à l’expertise d’un réseau de collègues et à leur soutien. « J’ai eu la chance d’être accueilli par une équipe dévouée, soutenante et patiente. Je pense notamment à mes collègues Geneviève Tremblay, François Brouillette et Marc-André Bernier qui me donnent confiance en mes capacités et m’encouragent en tant que jeune pharmacien. »

Geneviève Laflamme, pharmacienne détenant une expertise en soins intensifs et neurologie pédiatriques pratiquant au CHUL depuis 2002, abonde dans le même sens : « J’ai aussi pu compter sur un solide soutien à mes débuts : Lorraine Béliveau, l’une des premières pharmaciennes pédiatriques au CHUL. Maintenant que j’ai plus d’expérience, c’est à mon tour d’aider la relève! »

 

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« Le moment le plus gratifiant pour moi, c’est quand j’ajuste l’analgésie d’un patient et que, lors du suivi, il me mentionne que sa douleur a grandement diminué et qu’il me remercie pour mes soins. » - Erwan Nidelet, pharmacien à l’Hôpital Saint-François d’Assise


Enseignement 

Chaque année, les pharmaciens du CHU contribuent à la formation du quart des finissants pharmaciens au doctorat de premier cycle en pharmacie ainsi que des candidats à la maîtrise en pharmacothérapie avancée dans la province de Québec.

De plus, plusieurs pharmaciens enseignent à la Faculté de pharmacie ou dans d’autres disciplines en santé. Le pharmacien est appelé à donner des conférences sur les médicaments à ses collègues professionnels de la santé, qu’ils œuvrent au CHU, ailleurs dans la province ou au pays ou même à l’international.
 

Recherche

Le pharmacien occupe une position privilégiée pour identifier des questions de recherche visant l’amélioration des soins et de l’usage des médicaments. Son implication en recherche se fait sentir dans les domaines de l’antibiogouvernance, l’anticoagulothérapie, la chimiothérapie, la santé mère-enfant, l’usage optimal des médicaments, la pharmacoépidémiologie, la pharmacoéconomie et la gestion. Des 170 pharmaciens que compte le département de pharmacie du CHU, 76 sont membres du Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval (CRCHU); ils supervisent des projets de recherche des résidents à la maîtrise ou réalisent des projets à titre de chercheur ou de co-chercheur.

Par exemple, le Programme de gestion thérapeutique des médicaments (PGTM) est l’initiative des départements de pharmacie des cinq établissements universitaires du Québec; son mandat est de favoriser une utilisation optimale des médicaments par le biais d’activités incluant particulièrement la recherche et l’évaluation des technologies. Il réunit tout particulièrement des pharmaciens qui se dédient à l’évaluation des médicaments et à l’analyse de leur utilisation. Le PGTM vise la collaboration des centres universitaires hospitaliers dans la prise de décision sur des sujets qui les touchent. Il vise aussi à fournir des outils facilitant le suivi de l’utilisation des médicaments. Le CHU participe évidemment à cette collaboration.
 

Usage optimal du médicament

L’usage optimal du médicament se trouve au cœur de la plupart des activités pharmaceutiques. Visionnaire dans ce domaine, le Département de pharmacie créait il y a 10 ans son Unité pour l’usaGe optimal du Médicament et la Recherche (UGMR). Cette décision reposait sur une analyse des enjeux grandissants concernant les médicaments.

En effet, l’émergence de thérapies de plus en plus complexes, touchant des problèmes de santé rares, à des prix toujours plus élevés, et ce, dans un environnement réglementaire parfois complexe nécessitait de développer un secteur expert de ces questions. L’UGMR réunit ainsi quelques pharmaciens dont les activités touchent l’évaluation des nouveaux médicaments ou des nouvelles indications (gestion du formulaire de médicaments et des demandes exceptionnelles), le développement d’outils de prescription pour soutenir un usage optimal, la surveillance de l’usage du médicament par le biais de projets de recherche, la gestion des avis et alertes de Santé Canada concernant les médicaments, l’évaluation des options pharmacothérapeutiques et le suivi des dépenses en médicaments. Plusieurs de ces activités se réalisent par l’entremise de comités du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens touchant les médicaments.
 

Un rôle en évolution

Depuis quelques années, le rôle du pharmacien a évolué, autant dans la perception qu’en a la population et le personnel de la santé que légalement. En effet, si le pharmacien était auparavant souvent vu comme un « distributeur de médicaments », il est désormais considéré comme un professionnel de la santé spécialiste du médicament et faisant partie intégrante de l’équipe de soins. De plus, la législation lui donne maintenant plus d’autonomie, comme l’initiation et l’ajustement d’une thérapie, l’évaluation de la condition physique ou mentale d’un patient ou encore la prescription de tests de laboratoire ou d’imagerie, le tout dans l’objectif d’ajuster et d’optimiser les médicaments pour les patients.

Au CHU, la contribution des pharmaciens à l’amélioration des soins et des services est également de plus en plus reconnue et encouragée. Ainsi, par exemple, à l’Hôpital Saint-François d’Assise, les pharmaciens interviennent auprès des patients à la clinique pré-opératoire depuis plus de quinze ans et peuvent prendre en charge l’ajustement des médicaments pour certains problèmes de santé, comme l’hypertension, ce qui améliore la fluidité de la trajectoire en limitant les consultations auprès de spécialistes avant l’intervention (cardiologie, médecine interne…).

Du côté de la pédiatrie, c’est plus de temps auprès des patients que les pharmaciens offrent à leurs collègues : les doses orales pour la néonatalogie et les doses intraveineuses pour toute la pédiatrie sont préparées par le personnel technique de la pharmacie, ce qui laisse plus de temps aux infirmières pour les soins au chevet en les libérant de la préparation des médicaments.
 

« En pharmacie pédiatrique, il existe beaucoup moins de données probantes pour soutenir la pratique. C’est comme du ski hors-piste, il faut être prêt à "se mouiller" un peu plus et s’adapter constamment. C’est aussi une pratique très variée en raison des nombreuses spécialités et de la clientèle qui va de prématuré à 18 ans! » - Geneviève Laflamme, pharmacienne

 

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De gauche à droite : Simon Ouellet, pharmacien, Cynthia Côté, infirmière clinicienne, et Martin Noël, infirmier.
Cette photo a été prise avant la pandémie de COVID-19.

 

Photo principale : Jean-Pierre Bernier, pharmacien à l’Hôpital du Saint-Sacrement.




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