
Par Line Beauregard, membre du comité de rédaction, 1er décembre 2019
C’est une évidence de dire que la souffrance n’épargne personne. Que l’on soit riche ou pauvre, en santé ou malade, beau ou laid, entouré ou isolé, il est presque impossible de passer sa vie sans aucun moment de souffrance. Certaines personnes, soit par le soutien qu’elle reçoive ou par leur résilience, se sortent plus facilement de ces moments d’adversité. Pour d’autres, c’est tout autrement et lorsque la souffrance perdure ou se répète continuellement, qu’il n’y a aucune porte de sortie, aucun espoir que des jours meilleurs soient possibles, l’idée de s’enlever la vie peut germer en soi. Dans plusieurs cas, on en restera au stade d’un concept et il n’y aura pas de passage à l’acte. Mais pour certaines personnes, en finir avec la vie devient la seule solution pour stopper ce mal-être de vivre; elles poseront alors des gestes en ce sens, gestes qui malheureusement fonctionnent parfois. Au Québec, on compte chaque jour trois décès par suicide et 80 tentatives de mettre fin à ses jours. C’est énorme. Et si l’on compte toutes les personnes de l’entourage affectées par le suicide ou les tentatives de suicide, c’est beaucoup de familles et de communautés qui sont ébranlées.
Heureusement, la prévention a porté ses fruits si l’on en croit les taux de suicide qui ont baissé au cours des dernières années dans la foulée de la mise en application de la stratégie québécoise d’action face au suicide S’entraider pour la vie (1998). Mais les taux stagnent depuis les dernières années et de nouveaux phénomènes semblent émerger comme celui de l’augmentation de l’anxiété chez les jeunes ou la présence croissante des réseaux sociaux. La société a changé et les stratégies de prévention doivent être revisitées. Récemment, le gouvernement a annoncé la mise en place d’une nouvelle politique pour la prévention du suicide, répondant ainsi à la recommandation du Collectif pour une stratégie nationale en prévention du suicide. C’est une très bonne nouvelle puisque le suicide est un phénomène complexe dont les solutions passent par une stratégie nationale où toutes les instances concernées collaboreront pour mettre en place des pratiques encore plus efficaces. Comme vous le lirez dans les articles de ce numéro, les mesures de prévention appellent notamment la nécessité d’intervenir au plan individuel en visant le traitement des troubles de santé mentale. Mais il est tout aussi primordial de travailler sur les facteurs sociaux en mettant en place des mesures ciblées pour les groupes affichant des taux de suicide plus élevés, comme dans certaines communautés autochtones. Pour elles, comme pour d’autres groupes, la reconnaissance de leur place dans la société et de leur identité propre est une mesure primordiale ayant le potentiel d’améliorer grandement leur autonomie et leur qualité de vie. En somme une société plus juste, plus équitable permettant d’améliorer les conditions de vie de chacun est essentielle. Cela n’empêchera pas de vivre des moments inévitables de souffrance, mais permettrait de garder le nécessaire espoir à la vie.